#jassumelapsy pour déstigmatiser la santé mentale

#jassumelapsy pour déstigmatiser la santé mentale

Pendant longtemps, la santé mentale était « le parent pauvre » de la prise en charge des individus. Longtemps, on stigmatisait les patients qui avaient des symptômes psy (remarquez, je n’ai pas dit un problème psy, je dirai à la place un problème de santé psy), bien souvent en les taxant de dingues, de fous, de débiles, de malades imaginaires et j’en passe… Quand on connait, historiquement, les ravages qu’on fait les guerres – repensez aux soldats de la Première Guerre Mondiale, et de ce qu’ils ont vécu et combien en sont revenus perturbés, voire complètement traumatisés, mutilés dans leur chair, mais aussi dans leur âme. A l’époque, on ne les soignait pas comme on pourrait le faire aujourd’hui.

La santé mentale est essentielle.

Et pourtant, cela reste compliqué d’avouer consulter pour un problème psy, bien souvent pour la dépression, une maladie qui est mal comprise, dont les symptômes ne se voient pas réellement (on n’a pas de boutons, on ne boite pas, on a juste d’énormes bleus à l’âme et ça peut passer inaperçu ou être mal interprété). Pour être malheureusement passée par là à plusieurs reprises, j’ai constaté beaucoup d’incompréhensions : tant qu’on ne l’a pas vécue, la dépression est souvent incomprise par les autres. « Tu n’as qu’à te remuer », « il ne faut pas t’apitoyer sur ton sort », « il faut penser à autre chose« … et j’en passe, ceux qui l’ont vécu savent, peut-être même que ceux qui ne l’ont pas vécu savent aussi les mots qu’ils ont pu prononcer. Parfois aussi, on se retrouve face à un mur, les gens taisent les choses, ne vous en parlent pas, et c’est encore plus douloureux, comme si une souffrance physique (qui se voit : on demande souvent à un malade s’il a mal) avait plus de « légitimité » qu’une souffrance psy (on ne le demande que rarement).

Tant et si bien que les dépressifs se sont mis à taire leur mal-être, on appris à ne pas le dire, le cacher, et ne plus consulter. C’est une maladie qui ne se voit pas. Alors nécessite-t-elle vraiment un traitement? La réponse est évidemment OUI.

Irait-on dire à une diabétique « c’est dans ta tête! », à un insuffisant respiratoire de « prendre sur lui » ou à quelqu’un souffrant de rhumatismes « de se remuer »? C’est tellement incongru !

Oui mais : il y aura toujours des gens qui objecteront que la maladie psy n’est pas pareille que la maladie que je qualifierai de « pyhsiologique » (je ne trouve pas d’autres mots), je veux dire la maladie de type diabète, cancer… que tout se passe dans la tête, comme si le fait que « ça se passe dans la tête » nous dédouanerait de souffrance, comme si on pouvait avoir le pouvoir de prendre le dessus sur ce mal-être. Eh bien non!

Quand on va mal, on le sait, mais on refuse de voir la vérité en face. On souffre, mais on s’enfonce sans consulter. Il faut du « courage » pour y aller (je n’aime pas le dire, comme si il fallait se targuer d’avoir ce courage !), mais c’est un fait, le dépressif, celui qui va mal, s’enfonce de jour en jour : il souffre, et il ne voit aucune issue, si ce n’est l’issue fatale, il se sent nul, et tout ce qui lui arrive n’est que de sa faute, il voit tout en noir, rien ne va, il souffre d’une grande baisse d’estime de soi. Il culpabilise énormément et culpabilise encore plus de culpabiliser car « il y a toujours pire que soi », et c’est vrai. Mais y-a-t-il une gradation dans le mal-être? J’ai envie de dire OUI et NON. Oui, car on ne peut pas comparer la douleur d’un deuil, à une autre. Et pourtant, quelque soit la douleur, elle peut être intense : celle de la maladie, de la vieillesse, de la perte d’un être cher, de la perte de repères (emploi ou autre) etc…. tout est difficile à vivre quand on plonge dans la dépression. Il faut essayer de le comprendre, aussi difficile que ça peut l’être. Même lors d’un post-partum (la maman devrait aller bien, elle devrait être heureuse !)

Aujourd’hui et depuis un an, on subit une crise sans précédent : et il est donc normal, par moment ou plus souvent de ne pas se sentir bien… Mais il y a une différence avec la dépression. Celle-ci se caractérise par une profonde tristesse (du matin au soir), une grande irritabilité (on ne supporte plus rien, difficile quand on a des enfants !), un repli sur soi (souvent mal interprété – les gens pensent qu’on leur fait la gueule –> en fait, on va juste très mal !), une perte d’intérêt pour tout ou presque (plus envie de manger, de lire, de sortir, de se lever, etc…), une grande culpabilité (c’est de ma faute) et des idées noires très noires (jusqu’au suicide). On ne mange plus, on dort mal, très mal, on n’a plus d’énergie, on préfèrerait rester couché et si on ne le fait pas, on a du mal à tenir debout (vécu !).

Et pourtant il faut consulter : avec ce hashtag #jassumelapsy (que j’ai vu passer aussi dans un communiqué de presse pour mon boulot), c’est aussi un moyen de montrer qu’on est toutes et tous concernés et surtout, je pense, qu’il n’y a aucune honte à le dire : nous n’en sommes pas à crier sur les toits la maladie, pas plus qu’un diabétique n’irait crier qu’il prend de l’insuline, mais consulter pour des besoins psy ne doit plus être un tabou. On peut en avoir besoin pour sortir de la dépression, mais aussi pour d’autres choses. Le parcours qui nécessite de consulter pour raisons psy n’est pas parsemé de pétales de roses, on en sort souvent « rincé », mais on peut aller mieux. Rien n’est inéluctable.

Un arc-en-ciel parce qu’après la pluie vient toujours le beau temps (c) Pixabay – Unsplash

Je sais pour m’en être ouverte ici à vous que beaucoup d’entre vous souffrent aussi, puisque certaines se sont livrées en commentaires ou en privé, je sais aussi que certaines n’osent pas se livrer, par pudeur, aussi probablement, mais en tout cas, la dépression est une maladie qu’il faut soigner, qu’on peut soigner et qu’on ne doit pas taire. Simplement car le fait de le dire permet aussi d’avancer : vos proches comprendront mieux si vous expliquez ce repli que si vous le taisez (même si ça reste difficile pour les autres à comprendre et à vivre), peut-être pourront-ils vous aider (la meilleure manière d’aider un dépressif, à mon avis, est de l’écouter quand il veut parler, de l’aider, de l’épauler le reste du temps, c’est ce qui m’a aidée à me relever petit à petit) sans vous juger (toute la difficulté est là, je pense!). Longtemps, la dépression a été mal jugée, et il faut vraiment qu’elle soit considérée comme une pathologie à part entière qui n’est pas honteuse. Avec ce hashtag #jassumelapsy, j’assume totalement d’avoir eu besoin d’exprimer toute ma détresse à une psychothérapeute, j’assume totalement de devoir prendre un traitement antidépresseur (ma fameuse « béquille chimique »), des anxiolytiques pour dormir (dont je me suis enfin sevrée) et je vous encourage à lever le voile sur cet aspect de la santé.

On ne peut se sentir pleinement bien que si « ça va là-haut », dans le cerveau : ce n’est pas « dans la tête », comme si ça n’existait pas, c’est bien « dans la tête » car chimiquement il y a quelque chose qui cloche. On a sans doute mis du temps à le comprendre, mais ça existe. Et ce n’est pas honteux. Aucune maladie ne l’est…

12 commentaires pour “#jassumelapsy pour déstigmatiser la santé mentale”

  1. Hello ! Tu as raison d’en parler, même si je pense qu’on stigmatise moins, on comprends mieux la maladie… mais il reste parfois une honte d’en parler. Sans doute comme tu le dis parce que l’on a toujours cette idée qu’il y a une gradation dans notre mal-être ! Bon courage et bonne guérison, tu sembles sur la bonne voie

  2. Coucou.

    Je sais que trop bien ce que tu ressens pour être passée par là et de nouveau en plein dedans
    Courage ma belle. Il faut s’accrocher à chaque petit moment de bonheur et remonter la pente petit à petit.
    Je m’attache à chaque petit moment de répit pour ma part même si c’est très dur.
    Bisous et tu peux m’appeler quand tu veux. Mais je sais que dans ces moments on s’isole…

  3. J’ai vu passer le Hashtag aussi hier!
    C’est déjà un premier pas…
    Perso, je suis 100% pour!
    Thérapie perso, de couple, familiale, all of it!
    J’ai déjà fait 2 thérapies ultra nécessaires.
    J’aimerais en faire une 3ème là pour digérer la maternité mais c’est la croix et la bannière pour trouver qn remboursé par ma sécu ici en Teutonnie + compétent dans ce qui me travaille…
    Trouver LA bonne personne est absolument crucial sinon les effets négatifs peuvent être dévastateurs…

  4. Bonsoir,
    Je me suis déjà demandée de quelle manière l’histoire de nos générations antérieures pouvait peser dans la vie de la génération d’aujourd’hui. Les traumatismes passés de nos ancêtres doivent bien influer dans l’éducation, dans nos liens avec les autres et dans la conception qu’on peut se faire du monde. On hérite de ce vécu et quelque fois cela nous dépasse. Déjà que le quotidien peut s’avérer difficile…
    Je pense avoir une force intérieure qui m’a jusqu’ici permis de passer les caps difficiles. Néanmoins il m’est arriver de me sentir vaciller. Je peux comprendre qu’une aide quelqu’elle soit soit la bienvenue. Il n’y a aucun tabou à avoir. Heureusement la société a bien avancé à ce niveau.
    Tu es bien entourée. Tu trouveras ta voie vers le mieux-être… Faut s’accrocher aux petits moments positifs qui ponctuent nos vies et qui remontent le moral. Bisous

    1. oui, s’accrocher aux moments positifs, c’est important, mais pas toujours facile, à certains moments, on ne les voit plus, même s’ils sont là, tellement la noirceur occulte tout !

  5. Je suis contente que tu parles de ce genre de choses sur ton blog, où je pense que ça a sa place ; il faut en effet qu’un grand nombre de personnes, dont des personnes comme toi qui sont lues, parlent de ces choses pour aller de l’avant et oser consulter ! Qu’elles qu’en soient les raisons, on passe(ra) sans doute toutes et tous un jour dans une détresse morale qui fera que notre santé mentale sera en danger : pourquoi refuser de l’admettre alors que comme tu le soulignes, c’est une maladie au même titre qu’une autre (diabète ou rhumato, etc…)

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